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Juridique

L’expulsion d’un fermier en place ne peut être décidée unilatéralement par un coindivisaire

1) La règle légale

Selon l’article 815-2 du Code civil, tout indivisaire peut prendre seul les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis. Contrairement aux actes d’administration (ou de disposition) qui requiert l’accord de l’ensemble des coindivisaires. La frontière entre actes conservatoires et actes d’administration est délicate à définir, ce qui est source de débats juridiques.

2) L’arrêt du 6 février 2025 précise cette distinction en ce qui concerne la possibilité pour un indivisaire d’agir seul en expulsion d’un occupant sans droit ni titre.

Dans cette affaire, deux coindivisaires, titulaires de droits indivis sur une parcelle donnée à bail à ferme à une SCEA, étaient en litige quant aux conditions de résiliation du bail. 
A la suite du décès du preneur initial, le bail s’est poursuivi au profit de son conjoint survivant, avant d’être exploité par une société gérée par un successeur.
Un congé a été délivré en raison de l’âge de la retraite du preneur, mais le nouveau gérant de la société exploitante a refusé ce congé en revendiquant le renouvellement du bail.

L’un des coindivisaires a alors saisi le tribunal des baux ruraux pour obtenir la reconnaissance du statut d’occupant sans droit ni titre de l’entité exploitante et son expulsion.
L’autre coindivisaire est intervenu volontairement pour s’opposer à cette demande en invoquant son droit indivis sur le bail.

  • D’où la question soulevée par l’arrêt : un indivisaire peut-il agir seul en expulsion d’un occupant sans droit ni titre sans compromettre les droits de l’autre coindivisaire ?
     

3) La réponse de la Cour de Cassation

La Cour de cassation rappelle que, si un indivisaire peut prendre seul les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis, cette notion ne peut pas couvrir une action ayant pour effet de mettre un terme à un bail rural dont le maintien est revendiqué par un autre coindivisaire.

  1. L’action engagée par un seul coindivisaire ne pouvait donc pas être qualifié d’acte conservatoire, dès lors qu’elle tendait à une remise ne cause des droits d’un autre coindivisaire sur le bien indivis.
  2. L’idée étant de préserver les droits de tous les indivisaires en évitant qu’un seul puisse prendre des décisions affectant substantiellement la gestion du bien indivis.

Sophie BLANCHIN

Juriste en Droit des Sociétés

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